En avril 2015, Jean Pane était venu nous présenter Naples au siècle des Lumières (XVIIIème siècle). La conférence s’achevait à la fin de ce siècle avec un retour triomphal à Naples de Ferdinand dit le
Re Nasone qui retrouvait son Royaume et son peuple.
Ce mardi 19 mai 2016, Jean Pane est venu au CEC nous raconter la suite de l’histoire napolitaine (XIXème siècle). Une histoire qui commence mal pour les Bourbons. En effet, vainqueur à Austerlitz contre la coalition Russie-Autriche-Suède-Royaume Uni à laquelle Ferdinand s’était allié, Napoléon 1er envahit sans problème le Royaume de Naples en février 1806 puis installe son frère Joseph Bonaparte sur le trône. Celui-ci prend le nom de Joseph 1er et remplace Ferdinand qui se réfugie une nouvelle fois en Sicile.
Pendant ce temps commence à Naples le Decennio Francese (ou les 10 ans d’occupation française) avec l’abolition des privilèges, la suppression de certains ordres religieux ainsi que l’apparition de nouvelles taxes et lois proches du Code Civil qui écrasent l’ancienne législation bourbonienne. Naples se transforme. Sous l’influence de l’Empereur, Joseph 1er améliore la voirie grâce en 1809 à la création d’un Corps des Ponts et Chaussées. Puis survient de nouvelles institutions culturelles et scientifiques comme le jardin botanique (commencé en 1807) et l’observatoire astronomique de Capodimonte (fondé en 1812 par le nouveau roi Joachim Murat).
Car dès 1808, Joseph 1er n’a pu refuser le titre de Roi d’Espagne. Il est alors remplacé par Joachim Murat, marié avec Caroline, sœur de Napoléon. Celui-ci vaillant militaire et officier de cavalerie, reprend Capri aux anglais mais en 1810, la conquête de la Sicile échoue et l’île reste aux mains des Bourbons. Murat est une girouette. Après s’être allié avec l’Autriche contre Napoléon (afin de conserver son trône napolitain), il attaque l’Autriche lors du retour de Bonaparte de l’île d’Elbe (1815). Une cuisante défaite qui l’oblige à quitter Naples pour la Provence puis la Corse après Waterloo. Voulant reconquérir son royaume, Ferdinand aura le dernier mot et fera exécuter Murat.
Ferdinand, seconde fois roi de Naples, prend le nom de Ferdinand 1er des Deux Siciles. Il rénove le théâtre San Carlo (incendié malencontreusement) et pour assoir sa position royale, il fait construire la Basilique San Francesco di Paola (terminée en 1824 et consacrée en 1836 par le Pape Grégoire XVI). L’Autriche, garante de l’ordre en Italie, doit assister militairement Ferdinand malmené par des révoltes locales ainsi qu’en Sicile. En 1825, après le décès de Ferdinand, son fils ainé François 1er lui succède. Son règne sera court : 5 ans !
A gauche : Ferdinand Ier dit le Re Nasone (1751-1825), roi des Deux Siciles. Au centre : Giuseppe Garibaldi (1807-1882) en chemise rouge. A droite : Ferdinand II dit le Re Bomba (1810-1859), petit-fils de Ferdinand Ier.
C’est donc en 1830 que son fils Ferdinand II (dit le Re-Bomba) occupe le trône de Naples, position qu’il conservera jusqu’en 1859. Son surnom provient du fait qu’il a fait bombarder Messine le 7 septembre 1848. Car Ferdinand II est hostile et sans pitié à toute répression. Cependant, il embellit Naples par de superbes villas et l’industrialise (mines de fer, centre sidérurgique) servant à l’industrie d’armement et à la construction de la première ligne ferroviaire Naples-Portici. Mais le roi n’oublie pas sa sécurité lorsqu’il fait creuser en 1853 sous le Mont Echia, le tunnel Borbonnico (430m) pour permettre à la famille royale de prendre la fuite en cas d‘émeutes. Ferdinand décède en 1859 d’une septicémie. Elle est consécutive à des blessures mal guéries lors d’un attentat survenu 3 ans plus tôt.
Son fils Franceschiello (dit le Petit François, surnom affectueux) lui succède. L’année du sacre, il épouse Marie-Sophie de Bavière, sœur de l’impératrice Elisabeth (dite Sissi et popularisée par Romy Schneider au cinéma). Malade et piètre souverain, il ne reste qu’une année sur le trône.
En 1860, le royaume des deux Siciles est envahi par les Chemises Rouge de Giuseppe Garibaldi qui va mettre un terme, après maintes batailles, au règne des Bourbons. Il aura duré 126 ans. Après un référendum, le Royaume des Deux Siciles est annexé au Royaume d’Italie. L’Italie est réunifiée ? Presque car pour Garibaldi, l’Italie le sera vraiment lorsque le Latium et Rome, appartenant au Pape Pie IX seront annexés. De nouveaux combats commencent mais l’honneur revient au marquis Emilio Pallavicini di Priola (1823-1901) qui met fin à l’expédition de Garibaldi en août 1862. Garibaldi blessé, est emprisonné puis amnistié sur les conseils de Napoléon III. Huit ans plus tard, les troupes du général Rafarle Cadorna réussissent leur entrée triomphale dans Rome (septembre 1870). Et le 30 Juin 1871, Rome devient la capitale d’une Italie enfin unifiée.
Cependant, cette nouvelle Italie unifiée va rester divisée dans les esprits et dans les faits. Le nord riche par son industrie va longtemps narguer le sud plutôt pauvre, délaissé et contraint au chômage tout en étant gangréné par la Camorra à Naples et la Mafia en Sicile. Des moqueries, affronts et injures qui se sont même frayés un chemin dans le sport. En football notamment. Lorsque le SSC Naples se déplaçait à San Siro (stade fétiche de du Milan AC et de l’Inter de Milan), les tifosi milanais humiliaient les napolitains en brandissant des banderoles : Bienvenue en Italie ! Quel mépris pour le sud, une terre de culture où se sont développées les civilisations grecques et romaines à la base de notre identité européenne.
Ainsi s’achevait la magnifique conférence de Jean Pane qui nous recommandait le livre et le film Le Guépard (avec Burt Lancaster, Alain Delon et Claudia Cardinale dans les rôles principaux). Une conférence étoffée d’une multitude de détails, volontairement omis dans ce résumé mais que vous pourrez retrouver au complet dans le prochain bulletin des Amis du Vieil Istres (mars 2017) … Patience !
Jean Pane à droite remercié en fin de conférence par Robert Strozzi.