La conférence de Robert Strozzi

Jeudi 23 janvier, Robert Strozzi, membre du conseil d’administration de notre association, a inauguré à l’auditorium André Noël, le cycle des conférences proposées pour l’année 2020 par les Amis du Vieil Istres : Esclaves chrétiens, l’or blanc des pirates barbaresques en Méditerranée.

Du IXe jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, les pirates barbaresques (terme désignant au Moyen Age les pays d’Afrique du Nord situés à l’Ouest de l’Egypte) ont fait régner la terreur dans le bassin occidental méditerranéen. Robert nous a livré de nombreux exemples. En voici deux. D’abord en 858 avec le pillage de Marseille par les Sarrasins qui emmenèrent de nombreux captifs destinés à l’esclavage. Des Sarrasins qui attendaient aussi de leur capture une forte rançon comme celle de Rotland, évêque d’Arles, enlevé en 869. Le second exemple date du début du XIVe siècle, lorsque les pêcheurs martégaux se rebellèrent en attaquant une galiote pirate et pendirent tout l’équipage. Ceci afin d’intimider leur chef Baldazare Spinola (renégat chassé de Monaco par les Grimaldi) qui multipliait les raids sur notre région depuis le fort de Brégançon où il s’était installé.

Les actes de piraterie se sont ainsi succédés, sans trêve, en mer. Mais aussi sur terre (Martigues, Marseille, Camargue, Cassis, La Ciotat, Salins d’Hyères, Bormes, Saint-Tropez, Antibes …). Sur terre, les attaques s’effectuaient de nuit ou de jour en arborant le pavillon rescate (mot d’origine espagnole signifiant troquer). Le navire pouvait ainsi accoster en vue d’une tractation commerciale alors qu’il masquait en fait un raid bien préparé. Hommes et femmes étaient alors faits prisonniers puis emmenés dans les bagnes et autres harems du Maghreb et de l’Empire Ottoman. Certains hommes ont été châtrés pour devenir les fameux eunuques.

Robert Strozzi pendant sa conférence, assisté par Yolande Issert.

 

Durant des siècles, les pirates barbaresques se sont donc adonnés à la pêche aux esclaves blancs en Méditerranée. Bien entendu, ces prises humaines ont nui au développement du négoce et de la pêche alors que les rançons élevées provoquaient la ruine et la décomposition du tissu social. Citons une personne célèbre enlevée en 1575 : Miguel Cervantès (futur auteur de Don Quichotte) détenu ensuite pendant cinq ans à Alger. Dans la capitale algérienne étaient recensés en 1620 environ 35 000 esclaves chrétiens. Cette population européenne a conforté la puissance d’Alger par une main d’œuvre gratuite pour tous les durs travaux du pays.

René d’Anjou, comte de Provence et surnomme le Bon Roi René, ainsi que de nombreux organismes religieux et laïques se sont dévoués pour négocier et racheter (le plus possible) ces esclaves chrétiens. Les archives municipales de Martigues contiennent de nombreux documents sur les marins et villageois capturés et qui ont pu ensuite retourner sur leur terre natale après paiement d’une rançon. Quelques noms de cette époque restent fréquents aujourd’hui dans la Venise Provençale : Olive, Chaix, Jourdan, Tourel, Pellegrin, Bouc, Vidal …

Evidemment, il ne faut pas confondre pirates (qui opéraient pour leurs comptes personnels) et corsaires. Ces derniers étaient employés par une autorité (un roi par exemple) pour piller et couler des navires marchands ennemis. Quelques corsaires français sont connus aujourd’hui par leurs exploits comme Jean Bart (1650-1702), René Duguay-Trouin (1673-1736) et Robert Surcouf (1773-1827).

Les Chrétiens européens ne sont pas exempts de tout reproche ayant enlevé des Africains pour les exploiter dans leur Nouveau Monde américain. Mais aujourd’hui, les actes de pirateries existent toujours, notamment sur les côtes de Somalie. Il en est de même pour l’esclavage de jeunes enfants mal payés travaillant pour de grandes multinationales dans des pays dits en voie de développement. Aussi, Robert a conclu sa conférence par cette question : Quelle différence avec les pirates barbaresques … L’Humanité a-t-elle vraiment progressé ?

Robert Strozzi remercié par Claude Teissier, trésorière des Amis du Vieil Istres.

 

Prochaine conférence : jeudi 13 février 2020, 18h00 : La présence de la NASA sur la base d’Istres dans le cadre de l’atterrissage d’urgence de la navette spatiale par Pascal Jacques (auditorium André Noël).
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