Ce jeudi 4 avril, Robert Strozzi, secrétaire adjoint des Amis du Vieil Istres, nous a offert, à l’Espace 233, une magnifique conférence : Le roman du Château d’If : légendes et réalités.
Parti d’un poème de Jacques Barreau, écrit en 1871 (l’un des derniers prisonniers politiques que compta le Château d’If), Robert nous a d’abord décrit le célèbre îlot marseillais dont le nom provient sans doute du grec hypos: petite île, les Phocéens l’ayant baptisé Hypée.
Ce rocher a, pendant des siècles, constitué un refuge pour les pirates et autres contrebandiers. Il n’a appartenu à personne jusqu’au XIVe siècle. Car, il faudra attendre l’an 1381 pour que Jeanne de Naples, comtesse de Provence, se l’approprie, comme elle s’est appropriée toutes les îles, depuis Marseille jusqu’à Toulon.
Après l’annexion de la Provence au royaume de France en 1481, François Ier décide en 1524 de fortifier l’îlot afin de sécuriser la rade de Marseille. Les tours du fort sont munies de canons. Ce qui n’est pas du goût des Marseillais, inquiets de leur indépendance, car le fort est munie d’une garnison dévouée au roi de France et peut servir à les intimider en cas de conflit sur leurs privilèges. En 1533, François Ier se rend à Marseille pour le mariage de l’un de ses fils : Henri (futur Henri II) avec Catherine de Medicis et constate que le fort est pratiquement achevé.
En 1590, lors des guerres de religion, les troupes du Grand-duc de Toscane bivouaquent au pied du fort et construisent une enceinte provisoire. Celle-ci sera reprise et améliorée par l’ingénieur Raymond de Bonnafous, responsable des fortifications pour la Provence, de 1600 à 1607, sous le règne d’Henri IV. Le Grand-duc de Toscane ayant prêté beaucoup d’argent à Henri IV, le château d’If sert alors (provisoirement) de gage
Robert Strozzi, assisté de Yolande Issert.
Sous Louis XIV, Vauban juge l’emplacement de l’île très bon pour défendre Marseille mais il souligne la construction paresseuse du fort, prévu à une époque où l’artillerie n’était qu’à ses balbutiements. Des négligences qu’il va s’empresser d’améliorer. Depuis 1598, le fort est géré par la famille de Fortia, viguiers de Marseille. Il en sera ainsi, de père en fils, jusqu’en 1771. L’île d’If devient alors un rendez-vous de pique-niques auxquels participent le roi ainsi que des nobles telle la marquise de Sévigné et la comtesse de Grignan.
Robert nous a ensuite détaillé le fort de bas en haut et de long en large avant de l’aborder sous l’angle carcéral. Car dès 1540, il a servi de prison, enfermant des prisonniers de droit commun ou hébergeant, à l’écart de Marseille, des galériens malades. 3 500 protestants du sud du royaume y ont été incarcérés. Cependant, parmi les légendes du château d’If, il faut souligner que le marquis de Sade et le masque de Fer, n’y ont jamais été emprisonné. Mais certaines personnalités célèbres (comme Honoré Gabriel Riquetti, comte de Mirabeau, 1749-1791) l’ont été.
La Révolution n’a pas eu d’impact direct sur la vie de l’îlot, les contre-révolutionnaires étant guillotinés sur place à Marseille. Plus tard, au cours du XIXe siècle qui connut divers régimes de gouvernement, les cachots ont accueilli durant cette époque de nombreux opposants politiques. Des incarcérations qui se sont poursuivies jusqu’à la Grande Guerre 1914-1918 où furent alors emprisonnés des Allemands travaillant en France où en visite touristique ainsi que des Français soupçonnés d’espionnage et de collaboration avec l’ennemi.
Quant à Edmond Dantès, le célèbre évadé devenu comte de Monte-Cristo dans le roman du non moins célèbre Alexandre Dumas, c’est évidemment une fiction mais qui a rendu célèbre les prisons de ce château, effaçant presque l’histoire militaire du fort et de l’îlot. Une renommée qui a largement contribué à rendre le site touristique, après avoir été classé monument historique en 1926.
En fin de conférence, Robert a été applaudi et remercié ici par Michel Issert, secrétaire des AVI.
PROCHAINE CONFÉRENCE : Jeudi 9 mai 2019, 18h00 à l’auditorium André Noël (nouvelle mairie): Le pays de l’Etang de Berre au Moyen Age : châteaux, villages et territoires par Jean Philippe Lagrue, archéologue, chargé de mission