Samedi 6 octobre 2018, à l’espace 233 (CEC), se sont déroulées les 26e Rencontres Historiques de la ville d’Istres, organisées par les Amis du Vieil Istres.
Après l’accueil du public et en présence de Nicole Joulia, première adjointe, François Xavier EMMANUELLI, professeur des universités en histoire moderne, a ouvert les débats avec une première conférence : Une municipalité provençale au temps des Bourbons : Salon de Provence aux XVIIème et XVIIIème siècles. Onzième agglomération de Provence vers 1765, essentiellement rurale, Salon, ville seigneuriale et non royale, était pourvue d’une structure administrative municipale qui a commencé à prendre sa forme définitive tardivement. Comme dans toutes les cités du Midi, elle avait une double fonction : prise en charge des intérêts collectifs et tire-lire comtale. Son originalité (très relative) résidait dans le recours à un système électoral qui ignorait la candidature au profit de la proposition par l’exécutif, elle-même suivie de ratification puis d’un scrutin éventuellement clos par un tirage au sort, la désignation finale ne pouvant être refusée. Ce système était à base censitaire au sein duquel on pouvait distinguer dans la population masculine majeure trois groupes, celui des muets-spectateurs, celui des assistants et celui des intervenants. Placée sous une lourde quintuple tutelle, l’administration joua un rôle essentiel dans la perception de l’impôt et dans la préservation des plus hauts revenus, ceux de la noblesse foncière locale ou foraine.
Chercheuse en histoire de l’art et des jardins, Louise LEATES a enchainé avec : Les grottes architecturales dans les jardins du XVIIème siècle en Provence : Arnajon et Albertas. Cette conférence avait pour but de faire une mise au point sur les connaissances des grottes architecturales qui se trouvaient dans quelques jardins en Provence au XVIIème siècle. Louise Leates a auparavant présenté de superbes grottes architecturales parmi les plus connues en Europe et en France. Elles étaient rares, incrustées de coquillages et de minéraux et abritaient des sculptures. L’eau y coulait, créant des endroits privilégiés pendant les grandes chaleurs de l’été provençal. Des recherches récentes ont fourni des informations qui nous aident avec une datation, notamment pour la grotte qui subsiste toujours dans le jardin d’Albertas (Bouc-Bel-Air). Celle-ci se nommait au XVIIème siècle : le jardin des Seguiran, ces deux personnalités furent les premiers présidents en la Cour des Comptes. Celle d’Arnajon (Le Puy-Sainte-Réparade), créée pour Jacques Blanc, trésorier général du pays, est mieux connue. Le pavillon de Vendôme à Aix possède toujours sa grotte, aménagée en chapelle a une époque plus récente. Des grottes de fraîcheur, maintenant disparues, font agrandir cette petite liste : à Carcès pour le comte de Carcès, lieutenant général de Provence, et le pavillon de La Fare pour Henry Maynier d’Oppède, premier président au Parlement.
Après le repas de midi au centre familial de vacances, Jacqueline URSCH, conservateur général honoraire et présidente de l’association Alexandra David-Neel a ouvert l’après-midi avec Alexandra David-Neel : une femme engagée, dont on fête en cette année 2018 le 150ème anniversaire de sa naissance. Elle a été reconnue dans le monde comme l’une des plus grandes exploratrices du XXème siècle et la première femme occidentale à séjourner à Lhassa, capitale sacrée et interdite du Tibet. Mais la grande voyageuse, allant toujours au bout de ses rêves, a été également artiste, écrivain. Alexandra David-Neel fut une jeune femme engagée, théosophe, anarchiste, franc-maçonne, féministe d’avant-garde, journaliste… Toujours à la recherche d’un vrai bonheur car elle disait : Il est bon d’avoir vécu sa vie. C’est la meilleure chose, la seule raisonnable à faire dans la vie. Une conférence agrémentée d’archives riches et inédites, issues de sa maison de Digne dénommée Samten-Dzong.
Christian GIROUSSENS, ingénieur et fidèle adhérent des AVI, a clôturé ces 26e Rencontres historiques avec une conférence sur Jean Baptiste Regis (1664-1738), un missionnaire géomètre au service de l’empereur de Chine. Longtemps demeuré à l’écart de l’aventure en Extrême-Orient initiée au XVIe siècle, le royaume de France a lancé une opération originale d’étude de la Chine en y envoyant un groupe de Jésuites en 1684, sous l’égide de l’Académie des Sciences. Ainsi se sont rencontrées une pensée scientifique, une arrière-pensée commerciale et la vocation missionnaire des Jésuites pour convertir les peuples étrangers. Intéressé par les connaissances des Pères, l’empereur de Chine leur avait demandé de faire venir un second contingent, qui débarqua en 1698. Parmi ces nouveaux arrivants, Jean-Baptiste Régis, Istréen par sa mère et né à Aix le 31 janvier 1664 dont les compétences en astronomie et géométrie ont été mises à profit pour participer à la grande entreprise ordonnée par l’empereur Kangxi : la cartographie de la Chine. Arpentant littéralement le pays pendant dix ans avec ses collègues, il en tira une description géographique qui sera publiée en France en 1735. Jean-Baptiste Régis, sinologue avant l’heure, s’intéressa également à la chronologie de l’histoire chinoise et à la traduction des livres classiques confucéens. Sa vocation missionnaire fut cependant contrariée par le désaveu que la papauté infligea à l’enseignement catholique dispensé par les Jésuites aux Chinois. Parti de son pays natal sans espoir de retour, il mourut à Pékin en 1738 après avoir passé près de quarante ans au service de trois empereurs successifs.
Un vin d’honneur a clôturé ces 26e Rencontres Historiques.